Mais comme personne ici ne peut prétendre être la cause de ses intentions, où encore être la cause de ce qu'il est, ou en tout de ce qui le pousse à être ou à devenir, en quoi les intentions sont elles vertueuses?
Les gens croient que ce qu'ils sont a pour cause fondamentale, eux mêmes, ils font reposer leur volonté sur eux mêmes, radicalement, comme s'ils étaient les créateurs de cette volonté ou intention......alors que tout le devenir peut n'être que le résultat de la contingence, et ainsi, il n 'y a pas universellement + de mérite à agir avec ou sans intention, la différence entre ces deux états pouvant n'être que l'aspect pratique....et dans une telle manière de voir, l'intention n'a rien d'exceptionnelle, elle n'est qu'un état parmis tant d'autres.
Il n'y a pas de différence fondamentale entre agir avec ou sans intention.....car affirmer cela reviendrait à dire qu'il y a autre chose à attendre de la réalité, autre chose que notre réalité, une chose qui tiendrait compte des intentions...or comme l'intention ne dépend pas d'autrui, ça n'aurait aucun sens.
Moi par exemple, si demain je me retrouve à la rue et que des gens passent et me donnent des sous et que cela me permet de manger, je vais me dire qu'heureusement ces gens agissent ainsi car en pratique, cela me permet de manger....mais au delà de cet aspect pratique qui est positif pour moi, pourquoi y aurait il autre chose? En quoi cela change quelque chose de savoir si un tel ou un tel a agit comme ça par superstition (genre par peur que ma situation de clochard devienne la sienne s'il ne donne pas, par dictat religieux, par compassion, par calcul (bonne image de soi), etc......finalement, toutes ces raisons sont des intentions, car ces causes qui determinent ces gens à me donner de l'argent sont bien réelles. Ce serait quoi d'autre sinon, d'agir avec intention? Il ne peut pas y avoir d'intention sans cause, or toute cause est réelle, il n'y en a pas une moins vraie qu'une autre....
Pour le dire autrement dans un même ordre d'idée, c'est comme si un homme intelligent, ayant des qualités intellectuelles superieures, se targuait d'être plus intelligent qu'un autre, comme si finalement cette faculté dépendait de lui......cet homme ferait donc entièrement sienne la cause qui le rend superieur en intelligence, alors qu'en réalité, il n'y est pour rien, il constate simplement un état particulier le concernant, en comparaison à d'autres qui sont moins capables que lui, mais c'est tout.......idem pour l'enfant malade qui vient de naitre....en quoi devrait il faire sienne la cause de ce qui le rend malade? Et par la même, en quoi devrait on culpabiliser, dès lors, de ne pas avoir l'intention de faire l'aumône, d'être serviable et altruiste? Il n'y a pas de regret à considérer la réalité telle qu'elle est........aucun homme regrette de ne pas aimer telle ou telle femme, il regrette juste de ne pas être aimé par celle qu'il aime.....
Et au fond, à part avoir conscience de nous mêmes, c'est à dire à part nous observer nous mêmes, quelle part réelle vient vraiment de nous mêmes dans notre traversée de l'existence? A chaque moment, nous sommes le résultat des causes qui nous determinent selon les innombrables paramètres et influences qui s'ajoutent pour faire une somme dont découlera un résultat: notre réaction........à chaque instant nous sommes une somme.
La question de l'intention n'a pas réellement de sens, sans la question de savoir la cause de cette intention.....or, personne ne peut aller jusque là, en tout cas pour l'instant, peut être que les recherches sur le cerveau et tout ça nous permettrons d'avoir une réponse partielle, mais personne ne peut dire pourquoi il est determiné de telle ou telle manière à avoir telle pensée, tel comportement, tel désir...et donc la question de l'intention devient un horizon indépassable.
C'est comme deux amoureux dont l'un dirait à l'autre "je t'aime"........mais n'est ce pas vaniteux de dire "je t'aime"? En quoi le fait d'aimer fait de celui qui aime la cause radicale de cet amour au point qu'il puisse affirmer que c'est réellement lui qui aime, en disant "je t'aime"?
Ne devrait il pas dire à son conjoint : "ça aime via moi quelque chose qui n'est pas toi non plus".......ce serait peut être plus juste, dans la mesure où finalement cet amour est un effet subit par la personne qui aime, ce n'est pas cette personne qui determine qui elle aime ou non..malgré qu'elle fasse entièrement sienne la cause de cet amour....